L’ancienne joueuse internationale et personnage emblématique du foot féminin allemand, Birgit Prinz, est de retour sur le devant de la scène: en tant que psychologue, elle a suivi l’équipe nationale féminine allemande aux matchs préparatoires pour la coupe du monde contre la France (25 février 2019, victoire 1-0) et la Suède (6 avril 2019).
A l’initiative de la sélectionneure Martina Voss-Tecklenburg, Birgit Prinz a rejoint le staff de la sélection allemande pour l’accompagner médicalement et mentalement. Voss-Tecklenburg espère pouvoir compter sur l’expérience que l’ancienne joueuse a pu acquérir pendant les dernières années dans le domaine de la psychologie sportive, un renfort précieux pour l’équipe dans la phase préparatoire à Coupe du Monde1. Pour l’instant, l’engagement de Birgit Prinz n’est que ponctuel, limité à aux deux matchs préparatoires contre la France et la Suède2.
Birgit Prinz sur le terrain – une carrière exemplaire
Mais qui est cette fameuse Birgit Prinz qui a accompagné les jeunes allemandes pendant cette préparation ?
En 17 ans au niveau international, Prinz a joué 214 matchs et marqué 128 buts, ce qui fait d’elle la meilleure buteuse et joueuse la plus capée de la sélection allemande. Au cours de sa carrière, elle a gagné deux fois la coupe du monde ( 2003 et 2007) ainsi que cinq fois la coupe d’Europe (1995, 1997, 2001, 2005 et 2009). Elle a été couronnée meilleure footballeuse du monde trois années consécutives, de 2003 à 2005, et cinq fois deuxième. Cette carrière internationale exemplaire est complétée par une performance inédite au niveau national. Prinz gagne neuf fois le Championnat d’Allemagne, dix fois la Coupe d’Allemagne et trois fois la Ligue des Champions avec son club, le FFC Francfort3.
La carrière sportive glorieuse de Prinz se termine pourtant difficilement : la coupe du monde du foot féminin de 2011, accueillie par l’Allemagne avec de grands espoirs, donne lieu à des différends entre Prinz et la sélectionneuse de l’époque Silvia Neid. La communication fonctionne mal, Prinz ne retrouve pas sa forme habituelle et se voit remplacée sur le terrain de plus en plus tôt au cours des matchs… Les nerfs sont à vifs – les Allemandes sont éliminées en quart de finale par l’équipe japonaise. Prinz ne joue d’ailleurs pas une seule minute pendant ce dernier match4 et critique publiquement la sélectionneuse Neid5. Alors que les conflits ont pu être réglés, l’attaquante prend sa retraite internationale en 2011 et se retire un an plus tard également du monde du foot. En 2012, la Fédération allemande du football honore Birgit Prinz en organisant un match jubilé et lui décerne la distinction de capitaine d’équipe d’honneur (Ehrenspielführerin), une distinction que seule l’ancienne joueuse allemande Bettina Wiegemann avait obtenu auparavant6.
Birgit Prinz à côté du terrain – une joueuse aux formations multiples
Pendant sa carrière sportive, Prinz suit des formations professionnelles à l’origine de ses multiples diplômes : elle est masseuse, maitre-nageur médical et kinésithérapeute7. De surcroît, en 2010 elle termine ses études en psychologie sportive. La carrière professionnelle de l’ancienne joueuse lui ouvre en plus des multiples portes une fois retirée du terrain. Au début, elle pense à monter son propre projet mais choisit finalement de s’engager dans le club allemand TSG Hoffenheim, où elle participe au programme « Coup de sifflet pour la vie » (« Anpfiff ins Leben » en allemand)8. Au sein de cette initiative, Prinz accompagne des jeunes talents et entraineurs et entraineures à travers une formation psychologique. Son objectif est de leur fournir des outils et des mécanismes pour gérer des situations de stress et les préparer mentalement à une carrière sportive professionnelle.
Les défis mentaux d’une carrière sportive – pour Prinz un sujet personnel
Et qui de mieux placé pour cela que Prinz, qui déclare elle-même « ne pas avoir été préparée à être Birgit Prinz »9. En effet, la star allemande du foot féminin n’a jamais adopté ce rôle, qui lui déplaisait profondément. L’Allemande était aussi présente et offensive sur le terrain qu’elle était modeste et fermée en dehors. Elle ne cherchait pas l’attention médiatique, les feux de la rampe ne l’intéressaient pas. Par ailleurs la pression médiatique l’avait particulièrement affectée lors de la coupe du monde 2011 en Allemagne. Les questions des journalistes, la déception des médias lorsqu’elle n’avait pas marqué de but, ce focus sur elle en tant qu’attaquante décisive : tout cela conduisit Prinz à douter de soi et à perdre en confiance10. Ce trait de caractère explique pourquoi Prinz n’a jamais envisagé de continuer sa carrière dans le domaine du football en tant que commentatrice de matchs ou en tant qu’experte du foot féminin sur les plateaux de télévision. Aujourd’hui, elle se dédie à mieux préparer les nouvelles générations à la gestion du stress et des pressions qu’elle-même avait tant souffert. Elle profite de ses propres expériences qui – comme elle le décrit – la rendent crédible11. Sa botte secrète : se concentrer sur la personne et non le sport en tant que tel12.
Aujourd’hui, la voilà donc de retour sur le devant de la scène, prête à mettre ses compétences au service des joueuses allemandes. Lors du premier match contre les Françaises, la Mannschaft l’a remporté. Il est difficile de dire dans quelle mesure la préparation mentale de Prinz a participé à ce succès, mais il est certain qu’elle sera la dernière à souhaiter médiatiser sa contribution. Son retour dans l’équipe nationale a été typique : silencieux et modeste mais visiblement efficace !