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Accord Historique pour l’égalité salariale en Espagne

Par 15/06/2022 12:11 No Comments
Conférence de presse - @rfef
Conférence de presse à Las Rozas sur l’égalité salariale en Espagne – @rfef
La Fédération Espagnole de Football (RFEF) a signé un accord historique qui garantit des primes égales entre les joueuses et les joueurs de la sélection nationale espagnole.

Après les Américaines, il y a quelques semaines, ce sont les footballeuses d’Espagne qui franchissent une étape historique vers l’égalité salariale dans le football. La Fédération Espagnole de Football (RFEF) a annoncé mardi qu’elle allait égaliser les conditions économiques des équipes nationales féminine et masculine. L’accord s’applique pour les cinq prochaines années, ce qui devrait couvrir les deux prochains championnats européens – le premier débutera le 6 juillet en Angleterre et le second sera joué en 2025 – et les Coupes du monde de 2023 et 2027.

En Espagne, tout comme en France et contrairement aux Etats-Unis, les joueuses ne sont pas salariées de leur fédération. Elles ne peuvent ainsi pas recevoir de salaires à proprement parler. Elles ne touchent de leur fédération que des primes : d’image ou de performance, par exemple. C’est ce dont l’accord traite. Outre l’égalité des primes perçues par les joueuses par rapport aux joueurs, les droits d’image dont bénéficieront les Espagnoles seront également régularisés et elles toucheront un pourcentage sur les contrats de sponsoring.

Jour de fête au centre d’entraînement de Las Rozas

Luis Rubiales, président de la fédération, a confirmé l’accord lors d’une conférence de presse organisée par la RFEF à Las Rozas. Un seul mot aux lèvres des journalistes mais aussi des joueuses présentes : « historique ». Irene Paredes, ancienne défenseure du PSG et capitaine de la Roja, a tenu à féliciter le travail de la fédération : « Aujourd’hui est un jour historique et nous sommes ravis de le partager avec vous. Au nom de toutes les joueuses, je voudrais remercier la Fédération d’avoir pu conclure un accord aussi important, et de démontrer par des faits leur intérêt à continuer à pousser notre équipe nationale senior. »

La réussite de ces négociations, qui ont débuté l’année dernière, n’est néanmoins pas dûe qu’à la bonne volonté de Rubiales et de ses équipes. En effet, deux alliés de choix ont changé la donne lors de cet accord : l’avocate spécialisée dans le droit du sport Reyes Bellver et surtout FUTPRO, premier syndicat dédié au football féminin. Ce dernier assure la défense collective et individuelle des intérêts des joueuses. Son implication, inédite, est un signe très fort que les choses avancent dans le bon sens pour l’émancipation de la discipline.

Conférence de presse Las Rozas - @rfef
Conférence de presse à Las Rozas sur l’égalité salariale en Espagne – @rfef

Un accord à la hauteur du football féminin espagnol

À l’image des Américaines, dont l’argument principal à la demande d’égalité salariale était la différence notoire de succès entre la sélection féminine et celle masculine aux Etats-Unis, l’équipe féminine d’Espagne avait de quoi être frustrée. Septième au classement FIFA, tout comme leurs homologues masculins, elles ont permis à l’Espagne de recevoir le second Ballon d’Or de son histoire. En 2021, c’est Alexia Putellas, attaquante espagnole du FC Barcelone, qui a remporté la célèbre distinction, après Luis Suarez en 1960. C’est d’ailleurs quelques jours après le gala du magazine France Football que Amanda Gutiérrez a décidé de fonder FUTPRO. 

La réussite sportive du FC Barcelone, vainqueur de la Ligue des champions en 2021 et finaliste en 2019 et 2022, a largement contribué à la croissance et au développement du football féminin espagnol. Les licences sportives féminines de la fédération de football ont augmenté de 65 % au cours des sept dernières années (en 2015, elles étaient de 40 524 contre 67 149 en 2021). Le contexte positif dans le football espagnol, symbolisé par le lancement d’une ligue entièrement professionnelle dès la saison prochaine, a accéléré le processus de parité pour la sélection nationale.

« Je pense qu’il est difficile de trouver un accord aussi complet ailleurs »

L’égalité, un combat long et sinueux

En Europe, le changement avait déjà commencé. La démission de la Norvégienne Ada Hegerberg, première ballon d’Or féminine de l’histoire, de sa sélection nationale en 2017 avait bousculé les lignes. « Le football est le sport le plus important en Norvège pour les filles, et ce depuis des années, mais les filles n’ont pas les mêmes opportunités que les garçons », a-t-elle déclaré. Grâce à son geste fort, qui lui a fait rater la Coupe du Monde 2019 en France, la Norvège a conclu un accord selon lequel les équipes nationales masculine et féminine recevraient les mêmes primes.Le pays scandinave a été rejoint par la Finlande, les Pays-Bas, l’Angleterre, l’Australie, la Nouvelle-Zélande, le Brésil, l’Irlande, les États-Unis et désormais l’Espagne. 

Si cet accord est historique par nature, il n’en reste pas moins perfectible. L’AFE, Association de Football Espagnol, n’a pas souhaité assister à la conférence de presse de la RFEF afin de manifester certaines frustrations quant à l’accord. Selon eux, il est trop ambigu, notamment car il n’est question que de pourcentage et jamais de chiffres exacts. Il demande plus de transparence de la part de la fédération. 

Les méfiances du syndicat, comme un symbole, révèlent tout le travail qu’il reste encore à faire avant d’atteindre une égalité réelle et pérenne. La marche semble pour le moment trop haute pour la plupart des sélections en Europe et dans le monde. À l’image de la France, dont la fédération est loin de donner la priorité à l’égalité salariale. Un beau parcours de l’équipe de France à l’Euro cet été pourrait peut-être encourager la FFF et Noël le Graët à repenser leur position…

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