Malgré l’élimination précoce de l’Équipe de France lors de leur Mondial (1-2 contre les Etats-Unis), le Président de la Fédération Française de Football, Noël Le Graët, a confirmé la sélectionneure française à son poste dans un communiqué de presse. Un pari audacieux tant les incertitudes autour des Bleues sont nombreuses.
Le choix de la continuité
Alors que ses prédécesseurs Philippe Bergeroo et Olivier Echouafni ont pris la porte après s’être respectivement fait éliminer des Jeux Olympiques 2016 et de l’Euro 2017, l’ancienne sojaldicienne a été confirmée dans ses fonctions au lendemain de la défaite contre les Stars and Stipes.
A l’instar de son homologue masculin Didier Deschamps, défait lors de la coupe du monde 2014 et à l’Euro 2016, où il avait tout de même atteint la finale, Corinne Diacre est maintenue afin d’établir les bases pour la prochaine échéance internationale, l’Euro 2021 en Angleterre.
Le Bilan des Bleues de Diacre: une équipe à reconstruire, mais sur quelles bases ?
Si l’ancienne joueuse de l’ASJ Soyaux a toujours scandé qu’elle assumait ses choix, certaines de ses diverses prises de position lors du mondial interrogent.
En premier lieu, la faible rotation effectuée. Sur quatre des cinq matches disputés, le même XI de départ était aligné à une exception près : Bouhaddi – Majri – Renard – M’bock – Henry – Bussaglia – Thiney – Le Sommer – Gauvin – Diani.
Ce cruel déficit de turnover a mis en lumière le manque de robustesse de la liste. En marge du match de préparation contre la Thaïlande, la sélectionneure affirmait : « Je fonctionne avec un groupe de 14, 15 titulaires potentielles ». C’est bien là que se trouvait le problème de son effectif. Son adversaire américain disposait de 23 joueuses titularisables.
La convocation de Kheira Hamraoui au milieu de terrain, ou le remplacement ponctuel d’Amel Majri (n’ayant pris part à aucun match de préparation) par Sakina Karchaoui, qui n’aura finalement disputé qu’un bout de match contre le Nigéria, auraient pu offrir davantage d’options et permettre aux joueuses de récupérer.
Le placement d’Eugénie Le Sommer sur le côté gauche a quant à lui eu un double effet : se priver d’une avant-centre experimentée capable de gérer un match de haut rang et relayer au rang de remplaçante une pure ailière comme Delphine Cascarino, l’empêchant ainsi d’apporter de la vivacité.
Sur le flanc droit, depuis l’absence d’Houara d’Hommeaux, aucune remplaçante de poids n’a été véritablement trouvée. Souvent dépassée, comme dans son duel avec Rapinoe lors du dernier match, Marion Torrent semble pour l’instant montrer ses limites.
Beaucoup se sont aussi interrogés sur la présence quasi systématique de Gaëtane Thiney, dont l’apport offensif n’a pas été flamboyant, tendant à ralentir le jeu. Sans véritable meneuse depuis les départs successifs de Louisa Necib et Camille Abily, la formation tricolore a indubitablement manqué de liant et d’identité de jeu .
La prochaine échéance internationale se tiendra probablement en 2021, à l’échelle continentale. Amandine Henry, Wendie Renard et Eugénie Le Sommer avoisinant ou ayant dépassé la trentaine d’années auront-elle encore l’envie et la patience porter ce maillot Bleu ?
Le niveau du championnat de France est-il problématique ?
Si les joueuses de l’Olympique Lyonnais et du Paris-Saint-Germain ont l’habitude des rencontres à fort enjeu, notamment en Ligue des champions, les autres tricolores n’ont que très peu d’occasion de se jauger contre des formations de haut niveau, même en étant elles-mêmes professionnelles (Montpellier par exemple), dans un championnat majoritairement amateur. La gestion de la pression et d’une rencontre de cette envergure s’acquièrent uniquement à force de disputer des grands matches. Le professionnalisme pourrait également permettre à de nouveaux talents de se révéler ou de se confirmer, à l’image de Kadidiatou Diani qui n’a cessé de monter en puissance depuis son transfert du Paris FC (ex-FCF de Juvisy) au PSG. Pour bâtir, et ce de manière pérenne, une équipe de France fiable, cela devra certainement passer par la professionnalisation du championnat.
Comparer la France aux Etats-Unis, à l’Angleterre ou à la Suède, au vu de cette coupe du Monde, semble encore prématuré, tant le chantier français s’annonce encore long. Le niveau des championnats locaux augmentant à mesure de professionnalisation, l’écart entre les nations tend à s’amoindrir.
À l’heure où même le football féminin espagnol, accusant pendant bien longtemps un temps de retard, se développe à pas de géants (ndlr: 9 millions d’euros de droits audiovisuels pour les trois prochaines saison), la France doit plus que jamais combler son retard en la matière, au risque de se voir relayée au second plan du football international.