
Elodie Thomis, ancienne joueuse de l’Olympique Lyonnais, désormais JRI – ©L’union
Son aventure à l’Olympique Lyonnais a laissé plus que des traces dans le Rhône. Avec onze championnats, cinq Ligues des champions, et sept Coupes de France remportées, Elodie Thomis est entrée dans l’histoire des plus grandes. Pour l’Equipière, l’ancienne ailière des Bleues raconte son après-carrière derrière la caméra cette fois.
Un appel, une passe en profondeur, une accélération, un but. Ce récital, Elodie Thomis l’a exécuté devant le public français un nombre incalculable de fois. Au bilan : 122 buts en D1, 32 en sélections pour un peu plus de 500 matchs disputés au cours de sa carrière. Mais en 2018, la virevoltante ailière a décidé de stopper sa course et de tourner la page du football.
«Quand je suis devenue professionnelle, je ne me suis pas laissée avoir par le fait de gagner de l’argent et d’être dans les médias.»
« Tomtom » terminus
Loin d’être soudaine, sa décision a été le fruit d’une longue réflexion. Un an auparavant, en 2017, Elodie Thomis annonçait déjà la fin de sa carrière internationale. Mais aussi réfléchi soit-il, le choix de mettre un terme à une si longue et riche carrière n’en restait pas moins difficile. « Sur le coup, on se pose la question de savoir si on a pris la bonne décision, même si j’y ai énormément réfléchi. On a peur aussi, parce que l’on se retrouve dans un nouveau monde, une nouvelle vie », confesse l’ancienne pensionnaire de l’INF Clairefontaine.
Pourtant, sa reconversion, “Tomtom” comme la surnommaient ses coéquipières, l’avait en tête depuis un long moment. « Je viens d’un milieu assez difficile. Je connais la vie, je connais le travail. Quand je suis devenue professionnelle, je ne me suis pas laissée avoir par le fait de gagner de l’argent et d’être dans les médias. J’ai toujours fait en sorte de ne ‘’pas péter plus haut que mon c*l’’. En 2014, j’étais dans un pic de carrière, et je me suis dit qu’il fallait que je travaille sur ma reconversion », justifie-t-elle.
« Certaines prennent conscience, d’autres non. Mais il faut faire attention, car le football va très vite et la vie d’après est totalement différente. »
Le début d’une nouvelle vie
Mettre un terme à une carrière de haut niveau, c’est également adopter un nouveau mode de vie. Cette rupture, Elodie Thomis s’y était préparée : « J’ai toujours fait en sorte de vivre (ndlr, durant sa carrière) comme je vivais avant. J’ai fait en sorte de ne jamais dépasser la ligne rouge. Je vivais tranquillement, sans en faire trop. Ça aide. Quelque chose de très bête : quand tu es professionnelle, le docteur, tu l’as 24/24, mais quand tu arrêtes, il faut que tu l’appelles. »
Pas de choc moral donc, mais un tourbillon physique. « La seule chose qui m’a surprise, c’est que mon corps était fracassé. J’ai eu un contre-coup mortel. J’ai souvent été blessé dans ma carrière, et d’un coup j’ai tout ressenti, j’avais mal partout », lâche-t-elle.

Elodie Thomis, en championnat contre Issy-les-Moulineaux – ©Damien LG
Courir vers de nouveaux rêves
Ce qu’elle allait faire après, elle le savait depuis bien longtemps. En 2014 déjà, à 28 ans, elle décide de frapper aux portes des coulisses de l’OL, riches en métiers, pour anticiper la suite. « Je suis allée voir David Huttin, qui travaille à la formation de l’OL. Il m’a demandé ce que j’aimais, et je lui ai parlé de l’image. On a chacun fait des recherches de notre côté. Je lui ai parlé d’un BTS, mais il m’a dit que ce serait compliqué avec le foot. Mais intelligemment, ils m’ont proposé de faire une semaine de stage des métiers de l’image à l’OL. Et j’ai choisi d’être derrière la caméra. A partir de là, on m’a proposé de faire un stage chaque année, avec pour mentor Stéphane Oreccioli. Pendant 4 ans (ndlr, jusqu’à son arrêt en 2018), j’étais avec lui», raconte-t-elle.
Une audace qu’elle recommande aujourd’hui aux plus jeunes qui la sollicitent : « C’est à la joueuse d’avoir cette lucidité pour regarder à côté, ce qui se fait au club. Des jeunes joueuses me posent des questions. Certaines prennent conscience, d’autres non. Mais il faut faire attention, car le football va très vite et la vie d’après est totalement différente.»
En 2016, alors qu’elle prolongeait son contrat de deux saisons avec l’OL, elle accélérait en parallèle sur la piste de la reconversion : « Sur mon dernier contrat, j’ai commencé à préparer la suite. En signant, c’était du plus. Je prenais du plaisir tout en me préparant sur le plan professionnel. C’est ce que j’ai fait sur ces deux années, je jouais moins mais je me préparais avec Stéphane Oreccioli.»
Si elle souhaitait en premier lieu n’être que derrière la caméra, son mentor est parvenu à la convaincre d’aller plus loin. « J’ai dit à Stéphane que je ne voulais être que derrière la caméra. Il m’a dit que j’allais sortir du football avec un profil différent. Il a donc décidé de m’apprendre le métier de JRI (ndlr, journaliste reporter d’image). Je lui ai dit « Non, non, je ne veux pas être journaliste». Il m’a dit: « on va t’apprendre à filmer, faire un sujet, et monter un sujet. » »
«J’avais les Ligue des champions et d’autres titres, les stages, mais en termes de diplômes, de formation, je n’avais rien »
De l’avant à l’arrière de la caméra
A son arrêt, en 2018, Elodie Thomis s’est lancée dans la recherche d’emploi. Malgré ses stages répétés à l’OL, elle a alors été confrontée aux réalités du marché. « Quand j’ai arrêté le football, je postulais à des offres, mais j’avais des retours négatifs. J’avais les Ligue des champions et d’autres titres, les stages, mais en termes de diplômes, de formation, je n’avais rien. Alors sur toute une année, j’ai fait des formations certifiantes : drone, écriture, etc…», se souvient la quintuple vainqueure de la coupe européenne.
Un impératif pour se faire un nom dans ce nouveau terrain de jeu. « Quand on te reçoit et que tu as la preuve de tes compétences, tu es plus crédible. Je ne voulais pas rentrer dans cette logique où l’on m’embauche parce que j’étais une ancienne footballeuse. Je voulais vraiment que ce soit fait au mérite», confie-t-elle.
« Ça ne manque pas du tout. J’apprécie regarder les matchs en tant que spectatrice »
A force de travail, ses compétences sont aujourd’hui reconnues, et lui permettent même d’élargir son horizon et de réaliser des productions au-delà du spectre du football : « J’ai cette liberté. Je tourne beaucoup dans le sport et dans l’évènementiel. J’ai déjà eu l’occasion de travailler pour TF1, des petits reportages pour la FFF. Certains partenaires de l’OL font aussi appel à moi. Mon dernier reportage en date, c’était sur la mucoviscidose pour la société VICAT, rien à voir avec le football. »
En 2019, son entreprise de production audiovisuelle voit le jour. La même année, TF1 la sollicitait pour couvrir la Coupe du monde en tant qu’envoyée spéciale aux côtés de Camille Abily et Romain Balland. Une expérience des plus uniques, qu’elle a appréciée, sans toutefois regretter les crampons. « Ça ne manque pas du tout. J’apprécie regarder les matchs en tant que spectatrice », confie-t-elle en toute franchise.
Dans sa nouvelle vie, Elodie Thomis poursuit sa course à toute vitesse, mais derrière la caméra désormais.