Sara Gunnarsdóttir au trophée Veolia – ©Dominique Mallen
La recrue islandaise vit, avec ce « Final 8″, une intégration accélérée à l’OL. Passée cet été de Wolfsburg à Lyon, ce sommet européen aura pour elle une saveur particulière. Entre leadership, éternelle soif de victoire et passion du ballon rond, ses proches racontent la nouvelle Fenotte.
Terre de glace et de feu, l’Islande rassemble les extrêmes. Née au coeur de l’île boréale, Sara Gunnarsdóttir y a aussi vécu ses premiers contacts avec le cuir. Aujourd’hui, son sélectionneur Jón Þór Hauksson voit en elle un exemple de réussite pour son pays : « Toute l’Islande attend le match et espère qu’elle pourra soulever ce trophée. Ça signifierait beaucoup pour le football féminin islandais, elle est une source d’inspiration. » Source chaude alors, car entre glaciers et hautes températures, la capitaine de la sélection a vite fait son choix. Haukar Hafnarfjörður, son premier club, est situé à quelques kilomètres de la station thermale du Bleu Lagon, au milieu des champs de lave. C’est ici que la nouvelle milieu de l’OL a puisé cette énergie débordante, tant mise en avant par ceux qui l’ont côtoyée. « Elle se donne toujours à 100%, même si c’est juste un échauffement ou un petit jeu. Parfois, je me dis qu’elle en fait peut-être un peu trop et qu’elle devrait un peu plus prendre soin de son corps »,livre Lara Dickenmann, son ex-partenaire de l’entrejeu chez les Louves du VFL. Pour sa meilleure amie en équipe nationale, Rakel Hönnudóttir, « Sara n’est pas à l’entraînement pour rigoler. C’est cette mentalité qui l’a amenée à ce niveau. ». Le ton est donné.
Deux petits mois à Lyon et déjà patronne
Sa performance en demi-finale donne l’impression qu’elle joue dans l’entrejeu lyonnais depuis un paquet d’années. Avec trois buts en autant de matchs, l’Islandaise avait marqué les esprits dès le stage en Pologne. Elle s’est aussi montrée à son aise lors de ses entrées en Coupe de France. Si la blessure au mollet d’Amandine Henry en quarts de finale contre le Bayern a sans doute accéléré encore un peu plus son intégration, cette adaptation express coulait de source, tant son évolution est constante depuis le commencement.
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« Au lieu de rester dans cette zone de confort, elle relève un nouveau défi. C’est caractéristique de Sara »
Après un apprentissage dès l’âge de cinq ans dans son pays natal, elle débute sa carrière dans les clubs de Haukar et Breiðablik. Foudroyée à l’adolescence par une déchirure des ligaments croisés puis par une fracture du col du fémur, tout n’a pas été simple pour “Gunnar’. Elle raconte cette rude épreuve -qui a forgé son caractère- dans son autobiographie intitulée Óstöðvandi (ndlr : « Inarrêtable »). Par la suite, son départ en Suède a été un succès, elle y a remporté ses premiers trophées avec Rosengård, un club de Malmö : quatre sacres nationaux et un titre de Coupe en cinq ans ; rien que ça. Joueuse cadre en sélection, devenue capitaine en 2014, ses exploits ne pouvaient plus passer inaperçus. Du côté de la Niedersachsen, les dirigeants de Wolfsburg ont sauté sur l’occasion et Sara s’est engagée avec le double champion d’Europe (2013, 2014).
Toujours plus haut
En Allemagne, elle a passé un cap dans un championnat majeur avec l’un des géants d’Europe. Huit titres en quatre ans, mais pas encore de Ligue des Champions. Cette fois, en signant chez les quadruples championnes d’Europe en titre lyonnaises, elle rejoint les sommets et se donne toutes les chances de décrocher le Graal. « Je ne pense pas qu’elle pourrait être dans une meilleure équipe, elle est entourée de top joueuses, elle va encore apprendre d’elles. Elle est focus sur sa finale, c’est son moment, j’espère qu’elle va gagner »,confie Hönnudóttir. Son sélectionneur se réjouit tout autant de sa signature à l’OL : « Elle jouait dans une très bonne équipe, et était une joueuse clé pour Wolfsburg. Au lieu de rester dans cette zone de confort, elle relève un nouveau défi. C’est caractéristique de Sara et cela montre son ambition de s’améliorer et d’être la meilleure. ». Lors d’un entretien pour l’AFP vendredi, Gunnarsdóttir n’a pas caché ce désir d’aller tout là-haut, avec son « fighting spirit » : « Il n’y a aucune limite, si je travaille dur, je peux aller où je veux. »
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Leader naturelle, exemple sur le terrain
À Wolfsburg, la joueuse de 29 ans n’a laissé que de bons souvenirs. « Sara s’est imposée comme un membre permanent de l’équipe en très peu de temps et est devenue l’une des favorites du public. Sa bonne humeur contagieuse a certainement joué un rôle »,raconte Adina, une supportrice de Wolfsburg. Concentrée et appliquée sur le pré, son enthousiasme permanent a l’air de plaire au vestiaire : « C’est quelqu’un qui met l’ambiance. Elle aime chanter, danser. C’est une Islandaise, elle est plus bruyante qu’une Suissesse », sourit Dickenmann. « C’est une grande blagueuse », complète Hönnudóttir.
« C’est une leader naturelle, elle aide toutes les joueuses, les conseille pour devenir meilleures. C’est vraiment une bonne capitaine »
De retour sur le terrain, fini les chansonnettes du vestiaire, l’une de ses activités préférées. Elle retrouve son sérieux et enfile son costume d’exemple. En treize années avec la sélection nationale, Gunnarsdóttir compte 132 capes et elle en est la capitaine depuis six ans. « C’est une leader naturelle, elle aide toutes les joueuses, les conseille pour devenir meilleures. C’est vraiment une bonne capitaine », explique Hönnudóttir avec qui elle partage sa chambre en sélection depuis douze ans. Si elle n’a jamais vraiment porté le brassard chez les Louves, son ex-partenaire du milieu, Dickenmann, fait le même constat : « Elle s’est toujours comportée comme si elle était capitaine, c’est l’un de ses points forts. Dès qu’elle est dans une équipe, elle essaie de prendre les responsabilités, de guider le jeu. » Arrivé à la tête de la sélection en 2018, Jón Þór Hauksson apprécie de pouvoir compter sur une telle joueuse : « Sara est bonne sous la pression, elle a fait ses preuves quand les choses n’allaient pas bien, elle est toujours concentrée et garde ses coéquipières sur le qui-vive quand il le faut. C’est un très bon modèle pour nos jeunes. » Entre Rhône et Saône, elle sera entourée de leaders à la mentalité de vainqueures ; elle sera à sa place donc.
Dans l’entrejeu, elle sait tout faire
Ses premières sorties avec l’OL l’ont déjà montré, “Gunnar” court beaucoup, récupère des ballons en nombre, fait des différences par la passe et est très adroite devant le but. Une aubaine pour un entraîneur. « C’est une joueuse puissante avec une excellente endurance. Elle est très douée en défense au milieu de terrain et est une bonne organisatrice. Elle est aussi brillante de la tête et peut marquer des buts. Elle est très polyvalente au milieu de terrain », confirme Jón Þór Hauksson. « Dès ses premiers matchs, j’ai réalisé que cette joueuse était un vrai jackpot pour le club », complète la supportrice des Vertes.
Au rayon des axes de progression, Sara doit encore gommer certains défauts de ses qualités. Dickenmann raconte : « Je me rappelle de notre premier match ensemble en Pologne. À la 70e min, je lui dis qu’il fallait faire quelque chose car les Polonaises étaient à fond, super agressives. Juste après, elle monte sur un duel de la tête, elle met son coude et prend rouge. C’est elle, elle prend les responsabilités, et parfois c’est un peu trop. » Son sélectionneur rejoint la Suissesse : « Parfois, elle a besoin de se calmer et de ralentir le jeu. Elle a beaucoup travaillé dans ce domaine et s’est améliorée ces dernières années. »
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Finaliste malheureuse de la Ligue des Champions en 2018, elle avait dû sortir blessée à l’heure de jeu contre l’OL (ndlr : défaite 4-1 pour Wolfsburg). Cette fois, elle sera dans l’autre camp, au plus grand désarroi de son ancien entraîneur Stephan Lerch : « Elle était avec nous, c’est dommage qu’une joueuse qui a contribué à ce parcours ne soit pas avec nous en finale. C’était une joueuse-clé pour nous, mais ça fait partie du passé. Demain on jouera contre elle », a t-il regretté en conférence de presse d’avant-match. Attendue dans le onze de départ de Jean-Luc Vasseur ce dimanche, Wolfsburg est prévenu : gare à l’éruption Gunnarsdóttir.
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