Cette interview a été réalisée en coopération avec notre partenaire Polska Piłka Kobiet. Retrouvez l’interview en polonais sur leur site !

©Inès Roy-Lewanowicz
Arrivée dans la capitale française tout droit de Pologne en 2018, Paulina Dudek a récemment prolongé son contrat avec le PSG. Pour l’occasion, elle s’est confiée à L’Équipière.
« Commençons par votre départ de Pologne et votre arrivée en France. Quelles principales ressemblances et différences avez-vous perçu entre les deux pays ?
C’étaient deux mondes distincts. Il n’y avait honnêtement pas vraiment de ressemblances puisque tout ce que j’ai connu à Paris était nouveau pour moi. Du niveau footballistique à l’organisation du club, en passant par le marketing et tous les aspects hors terrain. Lorsque je suis arrivée, tout était plus professionnel. C’était une confrontation avec la réalité du haut niveau.
Y a-t-il eu une évolution du football féminin en Pologne depuis votre départ du pays ?
Je crois que c’est en train d’évoluer. Pas de là à dire que ce sont de grands pas, mais des transferts de joueuses comme le mien – ou ceux de Ewa Pajor et Kasia Kiedrzynek avant moi – communiquent des signaux positifs aux jeunes joueuses.
À propos de transfert, quel souvenir gardez-vous de votre arrivée au PSG ?
Le changement de pays a entraîné une période d’acclimatation après laquelle j’ai enfin pu me sentir comme chez moi. Mais ce n’était pas facile de rattraper le niveau physique et footballistique des filles. Heureusement, le club a été patient et a perçu le potentiel qui résidait en moi et j’ai aussi réussi à prouver ma valeur.
« Ils ont vu que je fais des efforts et que je mérite plus de temps de jeu.»
Apparemment ça a porté ses fruits ! Vous avez de plus en plus de temps de jeu. Vous vous attendiez à une confiance aussi rapide de la part du PSG ?
C’est compliqué à prédire, mais j’en avais l’espoir car je faisais tout pour y arriver. Je savais que je devais travailler dur. Je suis reconnaissante de voir que mon travail porte ses fruits et que les entraîneurs me font confiance. Ils ont vu que je fais des efforts et que je mérite plus de temps de jeu.

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Vous jouez aux côtés d’Irène Paredes. La côtoyer a-t-il été facteur de votre amélioration sur le terrain ?
Lorsque je suis arrivée en France, la charnière défensive était occupée par Irene et Erika, donc j’étais plutôt observatrice – autant en entraînement qu’en match – de leurs performances. C’était l’occasion de transposer ça dans mon propre jeu malgré le peu de temps sur le terrain. Quant au caractère, Irene est une personne toujours encline à me conseiller et je peux lui confier n’importe quoi. On s’entend bien sur le terrain, ça se voit et les statistiques suivent : la défense a bien fonctionné cette saison.
« À l’arrêt des compétitions, le jeu était encore ouvert et on aurait pu retourner la situation. »
A propos de la saison passée, le PSG se rapproche de plus en plus de l’OL sans pour autant parvenir à s’imposer. Comment l’expliquez vous ?
Chaque année on s’en rapproche. Je me souviens du premier clasico de la saison de D1. J’ai trouvé que notre équipe était plus forte mais il nous a manqué ce dernier pas pour les battre. Il aurait suffit d’un but mais on a perdu aux penalties, à la loterie. C’est facile de repousser la faute sur le sort et c’est vrai qu’on doit être plus décisives devant le but. Ce genre d’occasions ne se présente parfois qu’une ou deux fois dans un match et on ne peut pas les rater, pour montrer qu’on est capables de gagner.
Pensez-vous que si le COVID-19 n’était pas passé par là, vous auriez été capables de glaner le titre ?
On savait qu’on avait fait des erreurs qui auraient pu nous coûter la saison. Mais à l’arrêt des compétitions, le jeu était encore ouvert et on aurait pu retourner la situation en remportant tous les matchs. Y compris contre Lyon. L’équipe était en condition de le faire et je crois que si on en avait eu l’occasion, on aurait enfin pu mettre les points sur les i. On est donc vraiment frustrées, mais je pense aussi que rien n’arrive par hasard et que la victoire est encore devant nous.

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A confirmer lors des prochaines saisons. Et vous en ferez partie puisque vous venez de prolonger votre contrat avec le PSG. Quelles ambitions avez vous pour la suite ?
Puisqu’il était question de l’Olympique Lyonnais, c’est vrai que les matchs contre cette équipe sont toujours particuliers et remplis d’émotions. Cette éternelle rivalité m’anime. Et puis, bien sûr, je voudrais remporter la D1 et la Ligue des Champions. Peu m’importe que le PSG affronte parfois des problèmes, c’est un club qui vise toujours le plus haut et doit montrer sa force dans toutes les situations. Je suis dans le même état d’esprit : peu m’importent le match ou l’adversaire, l’objectif sera toujours de gagner.
La prochaine saison, vous jouerez aussi sans Katarzyna “Kasia” Kiedrzynek, qui est partie à Wolfsburg. Comprenez-vous sa décision ?
Je respecte son choix et je crois que chacun prend les décisions qui lui permettent de s’épanouir. J’espère que ça lui réussira. Quand je suis arrivée à Paris elle m’a aidée à m’intégrer malgré des débuts difficiles. Son optimisme, sa bonne humeur dans les vestiaires et le fait de parler polonais avec elle me manqueront, c’est certain ! Mais je sais qu’on ne perdra pas contact pour autant.
« Le ballon et les entraînement avec mes coéquipières, je suis faite pour ça et ça me manque ! »
Pour revenir aux conséquences du confinement, comment une athlète de haut niveau comme vous a réussi à garder la forme après ces derniers mois ?
Quand je suis rentrée en Pologne j’ai dû passer les deux premières semaines enfermée chez moi. Ça compliquait la réalisation des exercices envoyés par le préparateur physique du club. Heureusement, après j’ai pu ressortir, courir dans la forêt et augmenter l’effort. Le ballon et les entraînements avec mes coéquipières, je suis faite pour ça et ça me manque ! Mais le moment de nous retrouver en entraînement ne saurait tarder.
Vous avez déjà des informations sur le retour aux entraînements ?
La décision n’a pas encore été prise, mais il semblerait que la fin juin portera les couleurs du retour au terrain.
« En tant que femmes on doit souvent se battre pour l’égalité de traitement. »
Parlons maintenant de la Pologne. Suivez-vous la Ekstraliga (ndlr : le championnat polonais), même à distance ?
Oui. Il m’est arrivé plus d’une fois d’allumer la télé pour regarder les matchs, même quand nous-mêmes étions en déplacement. Je ne supporte pas un club en particulier mais j’essaye de suivre un peu tous les matchs.
Pourtant avant d’arriver en France vous jouiez à Medyk Konin. Vous n’avez pas une petite préférence pour elles ?
Évidemment, j’ai énormément de beaux souvenirs du Medyk. C’est là que j’ai débuté ma carrière professionnelle. Je dois beaucoup à ce club donc quelque part, je suis sûrement un peu plus de leur côté.
Il a été récemment annoncé que le championnat masculin reprendrait avec des supporters dans les gradins. Le féminin a, lui, été définitivement suspendu. Qu’en pensez-vous ?
C’est aussi le cas dans d’autres pays… Je me contenterai de dire qu’en tant que femmes on doit souvent se battre pour l’égalité de traitement. Cette décision ne m’étonne pas mais m’attriste énormément.

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Pourtant, vous disiez tout à l’heure que le football féminin en Pologne se développe. Comment percevez-vous cela ?
Je me souviens d’un temps – et pourtant je suis encore une jeune joueuse – où les matchs n’étaient pas retransmis, où les infrastructures n’étaient pas de qualité, les clubs n’étaient pas équipés d’une salle de sport ou d’un endroit de récupération. Maintenant, on a tout et on ne peut pas s’en plaindre. La diffusion des matchs de la sélection et l’ensemble des politiques de visibilisation ont permis aux choses d’évoluer.
« Les gens s’habituent au fait que ce n’est plus un sport essentiellement masculin. »

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Donc aujourd’hui, il est facile d’être une femme qui joue au foot en Pologne ?
Je crois que c’est devenu beaucoup plus simple et que ça n’étonne plus autant qu’avant. C’est sûrement le résultat de la visibilité du football féminin grâce à de grands événements comme la Coupe du Monde. Les gens s’habituent au fait que ce n’est plus un sport essentiellement masculin. Je trouve vraiment super que de plus en plus de gens traitent les femmes et les hommes de manière égale.
Vous restez optimiste pour l’avenir ?
Oui, sans aucun doute. D’une année à l’autre ce sujet ne pourra qu’aller dans une bonne direction. »
