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Le 3 juin 2008, la finale du Challenge de France (ancêtre de la Coupe de France) entre l’Olympique Lyonnais et le Paris Saint-Germain fut un soir de premières : pour l’affiche mais aussi pour l’enceinte. Retour en arrière avec Élodie Thomis.
À de nombreux égards, ce match revêt une atmosphère bien particulière. C’est la première rencontre féminine officielle à s’être jouée dans l’antre, qui a notamment vue les Bleus devenir Champions du monde en 1998. Un soir de 2004, un match de gala entre l’Allemagne et une sélection FIFA, emmenée par Corinne Diacre et Marta, avait bien eu lieu au Stade de France, mais il n’avait rien d’officiel. Cette finale 2008, dans ce cadre à part, est aussi la première opposant Lyonnaises et Parisiennes, et la première finale pour la section féminine du PSG. Ce soir-là, c’est surtout l’occasion pour l’une de ces deux équipes d’inscrire pour la première fois son nom sur la Coupe
Un match en lever de rideau des Bleus
Ce mardi 3 juin 2008, les médias sont bien concentrés sur un match qui se jouera dans l’enceinte de Saint-Denis, mais celui-ci est loin d’une finale de Coupe. À 21h les Bleus de Raymond Domenech affrontent la Colombie en amical. Avant le départ pour l’Euro en Suisse et en Autriche, le doute est grand autour de la participation du capitaine Patrick Vieira. Blessé, il est à la tête d’une équipe dont les performances ne rassurent guère. Mais ce soir là, ce n’était pas la petite victoire 1-0 des Bleus qu’il fallait venir voir, dans un match surtout marqué par les huées du public envers un Thierry Henry qui fêtait sa 100e cape en bleu.
Lyon en favori, Paris en outsider
Les saisons des deux finalistes n’ont rien en commun. Les Fenottes, coachées par Farid Benstiti, sont déjà championnes pour la deuxième fois consécutive avant même la dernière journée de championnat. Les Parisiennes elles, ont eu un parcours bien plus compliqué. Avec un groupe fortement renouvelé en début de saison par sept nouvelles têtes, dont Marie-Laure Delie, et l’arrivée du coach Éric Leroy, le PSG se classe cinquième de D1.
Une victoire au Stade de France permettrait à l’OL de réaliser le doublé coupe-championnat tout comme leurs homologues masculins dix jours plus tôt. Cette année-là, en quatre rencontres de Challenge de France, les Rhodaniennes ont marqué dix-huit buts pour aucun encaissé, avec notamment une victoire 0-3 à Soyaux en demi-finale. C’est aussi la toute première saison sous les couleurs lyonnaises du duo Elodie Thomis – Louisa Necib en provenance de Montpellier, club double vainqueur sortant de la compétition, battant à deux reprises en finale… les Lyonnaises.
Après un parcours contre des équipes de deuxième et troisième divisions, Paris retrouve Juvisy en demi-finale, pour un derby francilien qui n’a plus tourné à l’avantage du PSG depuis six ans. Alors que le score est de 1-1 à un quart d’heure de la fin, c’est Marie-Laure Delie qui vient délivrer les siennes avec un doublé. 1-2 score final. Ce n’est pas simplement une victoire contre leurs rivales, c’est un ticket pour « le rendez-vous de leur vie » que viennent de s’offrir les Parisiennes. Quelques jours avant la grande finale, les joueuses de Leroy ont le droit à un entraînement sous forme de répétition générale au Parc des Princes, afin de s’acclimater aux plusieurs dizaines de milliers de places des tribunes du Stade de France.
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Au coup d’envoi à 17h30, on estime que 700 spectateurs garnissent ces tribunes. Au fur et à mesure de la rencontre, elles se remplissent un peu au hasard. Un spectateur qui était venu assister à France-Colombie et qui est arrivé en deuxième période de la finale nous confie qu’il n’était pas vraiment au courant de ce match en lever de rideau, aucune réelle communication n’ayant été faite. Mais qu’importe. Comme nous raconte Elodie Thomis, titulaire ce soir-là sur le front de l’attaque, « on se rend vite compte que les terrains ont la même taille partout, les tribunes font juste paraître ça plus impressionnant ».
Les lionnes en grande pompe
Impressionnant, le premier acte ne l’est pas tellement. Après une occasion parisienne en début de match, les Lyonnaises imposent rapidement leur tempo mais n’arrivent pas à casser le verrou parisien, porté par une réussite incontestable. Mais au retour des vestiaires, la rencontre tourne nettement à l’avantage de l’OL. La blessure de la capitaine parisienne, Sabrina Delannoy sortie à la pause, n’a certainement pas aidé. Les Lyonnaises marquent à trois reprises par Shirley Cruz (52e), Louisa Necib (57e) et Camille Abily (77e) et auraient pu en inscrire un quatrième, s’il n’avait pas finalement été signalé hors-jeu.
La troisième mi-temps est forcément à l’avantage des troupes de Farid Benstiti qui laissent éclater leur joie devant plusieurs milliers de spectateurs qui ont rejoint le match en cours de jeu. Le club de Jean-Michel Aulas, évidemment présent au stade ce soir-là, remporte son premier Challenge de France.
Aujourd’hui, avec huit titres, l’OL est de très loin le club le plus titré, devant Montpellier (trois victoires en 2006, 2007 et 2009). Ce titre a donc forcément un parfum particulier, comme nous le confie celle qui gagnera par la suite sept coupes nationales et onze championnats de France avec Lyon. « C’était une belle fête, déjà parce qu’on gagne la Coupe, mais aussi parce que j’ai le souvenir de quelque chose de spécial, Lilian Thuram était même venu nous féliciter à la fin du match » se remémore Élodie Thomis. Les joueuses resteront au stade pour voir l’Équipe de France masculine disposer de la Colombie du jeune Radamel Falcao.
Avant le retour à Lyon, les joueuses auront le temps de fêter ça avec l’imposant trophée, qui pouvait contenir « pas mal de liquide », sans précisions sur la nature de ce liquide, bien entendu. « C’est le genre de chose qu’on peut voir à la télé quand les équipes gagnent, se rappelle Elodie Thomis, et ce jour-là c’était notre tour, c’était vraiment magique ! »
Le début d’une rivalité
Le lendemain, le retour à Tola-Vologes, l’ancien centre d’entraînement historique de l’OL, donnera lieu à un vrai moment de partage avec les employés du club. Le moment est d’autant plus intense que l’équipe masculine avait également ramené le trophée quelques jours auparavant, en disposant en finale… du Paris Saint-Germain, au Stade de France ! Quand les étoiles s’alignent, elles ne le font pas à moitié.
Si le souvenir de ce match est un peu flou douze ans après les faits, une chose est sûre : il a ouvert une ère pour le football féminin en France, celle de la domination des Lyonnaises et des prémices d’une concurrence venue de la capitale. Ces mêmes Parisiennes qui remporteront deux ans plus tard le Challenge de France, après avoir disposé de Montpellier en finale, et de Lyon en demi. Sur cette coupe-là, comme en 2018, la roue avait tourné. Pour le championnat, il faudra encore attendre.
Remerciements à Elodie Thomis pour avoir répondu à nos questions