
Après avoir présenté les principaux symptômes du Covid-19, l’internationale française et gardienne d’Arsenal Pauline Peyraud-Magnin est aujourd’hui guérie. Depuis Londres, elle nous raconte cette période délicate et réclame notamment une meilleure application des mesures de confinement.
« Pauline, il y a quelques jours vous disiez dans #Homefoothome vous sentir mieux après un moment compliqué. Aujourd’hui, vous êtes complètement guérie?
Oui bien sûr, ça va mieux aujourd’hui ! Je ne suis pas quelqu’un qui me laisse trop aller. C’est vrai que pendant dix jours j’étais couchée, clouée au lit, mais après j’ai commencé à reprendre progressivement des forces et une vie à peu près normale, avec le confinement bien sûr.
Qu’est ce qui vous a effrayé au cours de cette maladie?
Je pense que c’est l’hystérie collective parce que je n’ai pas non plus eu des symptômes très graves ! J’étais très fatiguée, j’ai eu du mal à respirer, j’avais un mal de tête constant, avec de la fièvre… Mais c’est ce que je voyais à la télévision qui me faisait vraiment peur. Je relativise énormément sur mon cas personnel. Je ne peux pas dire que j’étais à l’agonie, d’autres sont dans des situations beaucoup plus délicates.
“Le médecin du club m’a dit ce que je devais faire. J’ai aussi appelé le docteur de l’Équipe de France ainsi qu’un médecin dans ma famille parce qu’en France, on avait plus d’une semaine d’avance sur l’Angleterre”
C’est la gestion du stress, finalement, qui a été la plus compliquée à gérer?
Il faut savoir que je suis une grande stressée. Même si je ne me sentais pas horriblement mal, quand je me levais, je voyais tout noir ! J’avais l’impression que j’allais tomber… J’avais du mal à aller faire à manger dans la cuisine. Avec le stress, je dormais assise, j’avais peur de m’étouffer dans mon sommeil. Et puis, j’ai très vite arrêté de regarder les informations en France. Voir tout ce qui se passait, la psychose générale… J’en faisais des nuits blanches.
Justement, en France quand on commence à avoir des difficultés respiratoires, on dit que c’est à ce moment là qu’il faut appeler les urgences. Vos médecins ne se sont pas inquiétés?
Le médecin du club m’a dit ce que je devais faire. J’ai aussi appelé le docteur de l’Équipe de France ainsi qu’un médecin dans ma famille parce qu’en France, on avait plus d’une semaine d’avance sur l’Angleterre. Concrètement, l’absence d’odorat et de goût n’étaient pas encore connus comme des symptômes ici, j’ai donc pu avoir des conseils et un suivi depuis la France. Après, je n’ai pas été testée, j’ai eu beaucoup de symptômes, mais je ne peux pas être sûre d’avoir contracté le virus. J’avais juste à prendre du doliprane et attendre. Parfois, j’en prenais trois fois par jour. Il fallait beaucoup boire d’eau et attendre une évolution.
Vous pensez qu’il faudrait effectuer plus de tests, comme en Allemagne?
(Elle réfléchit). Ce n’est pas moi qui prend les décisions, je n’ai pas à me positionner là-dessus. Après, je pense que ça serait une bonne idée de savoir qui sont les personnes contaminées, afin de pouvoir protéger ceux qui n’ont pas le virus. Tous les gens asymptomatiques sont d’autant plus dangereux, parce que ceux qui ont les symptômes peuvent se confiner pendant les 14 jours demandés et empêcher la propagation du virus.
“ Ça ne sert à rien de faire les cadors dehors, de partir en vacances de Pâques… Il faut arrêter de se croire invincible, et mettre fin à ce type de comportement !”
Vous avez également pu avoir des conseils de votre père pompier et de votre soeur infirmière?
Mon père avec tout ce qu’il voit dans la journée, et ma soeur aussi, ont essayé de relativiser ! Ils m’ont aidée à prendre les choses positivement, pour essayer de me détendre, de moins psychoter. La situation est très malheureuse, et je tiens à adresser toutes mes condoléances aux familles endeuillées aujourd’hui, mais je pense qu’il faut qu’on ait une attitude un peu plus positive, insister sur ceux qui s’en sortent, ceux qui guérissent. Mais c’est humain d’être dans une spirale négative, comme ça.
Vous êtes une sportive de haut niveau et en parfaite santé. Quel message voulez-vous porter auprès de ceux qui pensent que seuls les plus vulnérables peuvent être atteints?
C’est clairement de l’inconscience de penser ça. On a vu ces dernières semaines qu’il y avait beaucoup de cas chez les jeunes. Il y a eu ce drame avec cette fille de 16 ans qui est décédée. On voit quotidiennement qu’il n’y a pas que les personnes âgées qui sont concernées. Ça ne sert à rien de faire les cadors dehors, de partir en vacances de Pâques, Il faut arrêter de se croire invincible, et mettre fin à ce type de comportement ! Ce n’est pas parce qu’il y a eu trois semaines de confinement que tout va s’arranger. Il n’y a qu’à regarder les chiffres de décès aux Etats-Unis : 1200 morts en une journée… C’est sérieux. Si j’ai un message, c’est évidemment : restez chez vous !
« Je le dis, je le répète, il faut en avoir conscience : on a vraiment de la chance d’avoir ce système médical en France […]. À l’étranger, c’est toujours plus compliqué”
Vous parlez des Etats-Unis, que vous inspire la situation là-bas où l’accès aux soins est loin d’être égal pour tous?
On a tendance à l’oublier au premier abord, mais la situation est évidemment extrêmement délicate. Il faut penser à tous les plus démunis dans certains pays qui ne pourront pas forcément se soigner à cause des coûts liés au système médical. Je le dis, je le répète, il faut en avoir conscience : on a vraiment de la chance d’avoir ce système médical en France, il faut s’en rendre compte ! J’avais un peu peur que ça tourne mal, car je ne connais pas bien le système médical ici. À l’étranger, c’est toujours plus compliqué.

Vous avez l’impression que certains prennent encore la situation à la légère, comme en Angleterre, où les mesures de confinement ont été prises très tard?
J’ai été surprise que ça arrive si tard. Ce sont nos voisins directs, on est proches. À partir du moment où on sait qu’il y a un virus qui potentiellement tue en masse, on aurait dû prévoir… Mais avec des “si” on pourrait refaire le monde. Maintenant, il faut avancer avec. Je pense qu’on a tous été en retard : la France, l’Italie, l’Angleterre…
Que vous inspire la quatrième prise de parole de la Reine en 68 ans de règne dimanche ?
Ça montre qu’on est dans un État d’urgence. Elle avait à coeur de montrer à son peuple qu’elle était derrière eux. Normalement, la Reine ne prend pas la parole, mais les temps sont particulièrement compliqués. Elle a eu des mots rassurants, justes, qui ont eu de l’impact. Le peuple anglais est attaché à cette famille royale. Quand elle parle, tout le monde l’écoute et je suis sûre que les Anglais vont faire les choses bien.
“Arsenal nous a envoyé un super vélo d’appartement. Ils nous ont fait livrer beaucoup de choses, on a un peu une salle de gym à la maison, c’est pratique !”
Vous vivez avec votre colocataire et partenaire en club, Louise Quinn. Elle n’a pas été malade?
Non, on a fait très attention. On a de la chance, on a deux salles de bain, deux toilettes. Ça enlève déjà une grosse zone à risque. Pour les parties communes, je n’allais pas dans le salon et lorsque j’allais dans la cuisine, je désinfectais tout derrière moi.
Avez-vous pu reprendre une activité physique normale?
J’ai repris à fond (rires) ! C’était dur les premiers jours après la maladie, il fallait que le souffle revienne. Arsenal nous a envoyé un super vélo d’appartement. Ils nous ont fait livrer beaucoup de choses, on a un peu une salle de gym à la maison, c’est pratique ! Avant le confinement, je me suis fait livrer un TRX (ndlr : des sangles de suspension) et avec Louise, juste avant que je sois malade, on avait pensé à acheter des gants de boxe pour continuer le cardio.
Le football vous manque? Vous avez forcément hâte de reprendre…
Au début, je me disais que j’étais malade donc que je ne loupais pas grand chose, que je ne pouvais rien faire. Mais depuis que ça va mieux, j’ai tellement envie de reprendre… En plus, on venait de gagner le Tournoi de France avec les Bleues, j’étais trop contente.. On verra pour la suite, ils cherchent une solution pour la reprise, on verra ce que ça donne. »