Christiane Endler fait partie des nombreuses joueuses à avoir quitté le PSG pour l’OL ces dernières années – ©Damien LG/OL
Ce soir, l’OL reçoit le PSG pour le choc de la D1 Arkema. Dix ans après sa professionnalisation, la section féminine de la capitale peine à conserver ses pièces maîtresses, qui filent souvent chez son rival lyonnais. Cette saison, après Sara Däbritz, l’OL a même failli enrôler la tête de gondole de son projet, Marie-Antoinette Katoto. Un choix de carrière judicieux ou trop risqué ?
Itinéraire d’un exode
« Cela fait dix ans que les Qataris sont arrivés. Si au bout de dix ans ça ne marche pas, c’est qu’il y a quelque chose qu’il faut changer. Il faut se remettre en question, faire évoluer. C’est tout ce que je souhaite au PSG qui est un beau club. Qui a tout pour lui. » Une déclaration, une détonation déclenchée par Marie-Antoinette Katoto, dans une interview accordée à RMC, à quelques jours du terme de son contrat avec le PSG en juin 2022.
À 23 ans, la meilleure buteuse de l’histoire du club parisien n’a jamais été autant courtisée. Après de nombreux pourparlers avec son club de toujours, la Titi a finalement prolongé son contrat pour trois années, malgré l’intérêt notoire de l’Olympique Lyonnais. Champion d’Europe en titre, le club rhodanien est surtout le grand rival du PSG sur la scène nationale mais aussi le Vieux Continent.
Ce cas, qui a suscité de vives réactions du côté des supporters du PSG, est loin d’être unique. Entre 2015 et 2022, 11 joueuses ont quitté le PSG pour rejoindre directement l’Olympique Lyonnais. Ces dernières années, l’OL s’est également penché sur des joueuses plus jeunes, comme les prometteuses Titis parisiennes Alice Sombath et Vicki Becho. Si certaines ont fait le chemin inverse comme Ève Périsset ou encore Sakina Karchaoui, les transferts s’opèrent principalement vers le sud de la France. Un exode qui s’explique par de nombreux facteurs, notamment sportifs.
Une soif de titres et une gestion décriée
À plusieurs égards, les joueuses de la capitale sont des cibles opportunes pour l’OL. D’abord, parce que la compétitivité du projet proposé par le PSG pose question, faute de continuité et de cohérence dans les choix sportifs opérés par la direction du club. Dix ans après la professionnalisation, le PSG n’a remporté que trois titres (Coupes de France 2018 et 2022, Championnat de France 2021). Par deux fois finaliste de la Ligue des champions (2015, 2017), le club de la capitale n’a jamais soulevé la Coupe aux grandes oreilles. Un palmarès relativement peu étoffé qui fait parfois fuir les joueuses en quête de trophées et d’un projet cohérent pour les féminines.
« C’est le moment pour moi de chercher un nouveau projet sportif, dans lequel je puisse gagner en expérience, m’améliorer, apprendre, et où le football féminin est soutenu sur un même pied d’égalité », déclarait ainsi Christiane Endler sur son compte Instagram en juin 2021, avant de basculer dans le Rhône. Une soif de titres et de considération qui a amené d’autres Parisiennes à prendre le chemin de l’OL depuis 2015, cinq fois vainqueur de la Coupe d’Europe sur cette période.
Une fois n’est pas coutume, c’est Sara Däbritz qui a pris la tangente cet été vers les terres adverses pour des raisons similaires. « J’ai eu un bon ressenti sur le projet, sur le club et son engagement, notamment pour l’équipe féminine, et j’ai saisi l’opportunité de venir ici […] Je veux faire partie de ce club, et aider l’équipe à gagner des trophées», expliquait à son tour l’internationale allemande.
Mais ce n’est pas le seul paramètre qui a conduit certaines à changer de camp. Outre le projet sportif vacillant et difficilement lisible, le PSG semble avoir une gestion peu proactive des situations contractuelles, notamment lorsque le contexte sportif lui semble pourtant favorable (2015, 2021).
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Un tournant risqué
Si changer de maillot comporte toujours un risque, rejoindre le plus grand club d’Europe, rival historique de son ancien club, l’est d’autant plus. D’un point de vue sportif, les joueuses, bien qu’effectivement plus titrées en quittant la Ville Lumière pour la Ville des Lumières, doivent faire face à une concurrence bien plus ardue.
Pour certaines, le transfert a semblé plutôt bénéfique dans un premier temps. Dès leur première saison, Caroline Seger et Jessica Houara ont régulièrement été titularisées par Gérard Prêcheur. Tout comme elles, Christiane Endler, reconnue comme la meilleure portière du monde, a tiré son épingle du jeu après sa signature en 2021. Malgré une blessure qui l’aura tenue hors des terrains durant plusieurs mois et le retour de prêt de Sarah Bouhaddi, la capitaine du Chili a été très souvent utilisée.
Pour d’autres, comme Signe Bruun et Perle Morroni, arrivées la même année, les débuts furent plus mitigés. La Danoise, malgré 7 réalisations après 20 rencontres en seulement 4 titularisations, a été prêtée dès janvier 2022 à Manchester United au retour de blessure d’Ada Hegerberg et de prêt d’Eugénie Le Sommer. De son côté, la latérale gauche a réalisé un début de saison 2021-2022 intéressant avant de voir Selma Bacha s’imposer à son poste. Pire, l’ancienne Parisienne n’a pas été sélectionnée pour l’Euro 2022, Corinne Diacre lui préférant Sakina Karchaoui et sa rivale en club.
Et malgré des débuts prometteurs, dans une telle écurie où le recrutement se veut compétitif à chaque intersaison, rien n’est jamais acquis. Lors de sa deuxième saison, Jessica Houara, en plus d’avoir subi une rupture du ligament croisé du genou droit, a dû faire face à la concurrence de Lucy Bronze fraîchement débarquée de Manchester City. A l’inverse, Kheira Hamraoui, peu utilisée lors de sa première saison (2016-2017), a semblé profiter de l’arrivée de Reynald Pedros et du départ de Caroline Seger dès 2017 pour engranger du temps de jeu.
Ce succès mitigé des transferts de la capitale vers la capitale des Gaules, dans laquelle aucune joueuse n’est restée plus de deux saisons entre 2015 et 2021, pose également la question de l’intérêt de l’OL à enrôler les joueuses du rival.
Se renforcer ou affaiblir le rival ?
Si ces nombreux transferts permettent factuellement d’affaiblir sportivement le grand rival, ils offrent surtout à l’OL la possibilité de recruter des joueuses déjà familiarisées avec le championnat de France et de limiter leur temps d’adaptation.
A l’été 2016, le milieu lyonnais était essentiellement composé de joueuses offensives comme Dzsenifer Marozsan, Claire Lavogez ou encore Camille Abily. Pour pallier son manque de profils plus défensifs, l’OL a su habilement profiter des échéances contractuelles parisiennes et faire débarquer Caroline Seger et Kheira Hamraoui. Dans leur sillage, Kenza Dali venait numériquement compenser le départ en retraite de Louisa Nécib.
Outre la profondeur de banc, l’OL sait également enrôler des joueuses sur des postes où les excellents profils sont rares. Avec Jessica Houara (2016) et Christiane Endler (2021), l’OL a mis la main sur des joueuses au sommet de leur art et difficilement remplaçables pour Paris. Après le départ d’Houara, Paris a dû longtemps innover au poste d’arrière droit, avec tout d’abord Eve Périsset, formée au milieu de terrain, puis Ashley Lawrence, latérale gauche polyvalente.
Loin d’être une simple manœuvre de déstabilisation, la signature de Parisiennes à l’OL semble bel et bien s’inscrire dans une véritable stratégie de recrutement ciblée lui permettant d’être des plus compétitifs sur tous les tableaux. Entre 2015 et 2021, les Fenottes ont réalisé quatre triplé Ligue des champions, championnat et coupe de France (2016, 2017, 2019, 2020). Un palmarès qui parle de lui-même.