©Guillaume Charton
Après Lyon et Paris la semaine dernière, de nombreux autres clubs de D1 s’apprêtent à reprendre les entraînements très prochainement. Focus sur les conditions de cette reprise avec Benjamin Barthélémy, préparateur physique du Havre et son homologue montpelliérain, Olivier Bernal.
A cause de la pandémie actuelle, la Fédération Française de Football a mis fin à toute compétition depuis le 13 mars dernier. Pas question pour autant de stopper les entraînements pour les staffs et les joueuses qui ont dû composer avec les règles sanitaires mises en place afin de maintenir une préparation physique en dépit de conditions particulières.
Entrainement confiné et distancié
A Montpellier comme au Havre, les préparateurs physiques Olivier Bernal et Benjamin Barthélémy ont fonctionné sur un système de programmes hebdomadaires envoyés aux joueuses. « Tous les dimanches soir je leur envoyais un programme pour la semaine suivante » explique le préparateur du nouveau promu en D1. « Chaque programme était basé sur des séances de courses variées, du travail de renforcement avec là aussi des exercices diversifiés mais aussi du travail d’étirements et de mobilité ». De son côté, Olivier Bernal indique que dans l’attente de la décision de la fédération quant à la compétition, il « est resté sur les logiques et dominantes de travail habituelles» dans les programmes qu’il proposait aux joueuses du MHSC. « C’était des séances orientées sur l’athlétique avec pas mal de courses ou de vitesse qui étaient proches des efforts sur un match ou un entraînement et de temps en temps on ajoutait le ballon pour pouvoir garder cette sensibilité là ».
« Ca restait du travail essentiellement de course et quand on fait du foot c’est pas forcément ce qui nous plaît donc à la longue ça peut devenir plus dur sur l’aspect psychologique » – Benjamin Barthélémy
Privées des aspects plus “ludiques” du football, le préparateur des féminines du Havre reconnaît que certaines joueuses face à la monotonie des séances l’ont « sollicité pour amener un peu plus de diversité et de variation ». Il admet volontiers que sur le long terme, cela a pu peser sur le moral de ses protégées. « Ça restait du travail essentiellement de course et quand on fait du foot c’est pas forcément ce qui nous plaît donc à la longue ça peut devenir plus dur sur l’aspect psychologique ».
Au MHSC, Olivier Bernal affirme que la décision tardive de la fédération a participé au maintien de la motivation des joueuses. «Tant qu’on ne connaissait pas la décision pour le championnat, les joueuses avaient en tête l’objectif de reprendre et de jouer. Elles devaient être prêtes à reprendre à tout moment et cette possibilité de reprise a été un élément moteur du confinement au niveau de la motivation».
Le maintien du suivi régulier des joueuses
Malgré la distanciation, les préparateurs physiques ont été en communication constante avec leur joueuses et ont suivi de près leur travail. Avant l’annonce du confinement, les Havraises effectuaient leurs séances équipées d’un GPS. « Au début elles nous ramenaient les GPS et on exportait des données directement pour suivre leur travail » indique Benjamin Barthélémy. Avec les règles de distanciation sociale cela est devenu impossible et c’est via des applications mobiles « comme Runtastic ou Strava » que le suivi s’est poursuivi. « Les joueuses utilisaient les applications puis elles nous fournissaient des captures d’écrans à la fin de leur course» précise-t-il. Pas de GPS pour les Montpelliéraines d’Olivier Bernal mais un suivi tout aussi minutieux. « On avait les joueuses régulièrement au téléphone, aussi bien le staff technique que médical et à chaque fin de semaine elles devaient nous faire un état de forme, c’est- à dire comment elles ont vécu leur semaine, qu’est ce qui a été problématique pour elles, qu’est ce qu’elles ont trouvé de bien, leur douleurs potentielles… » détaille-t-il. Le but était de prévenir toute blessures lors de ces entraînements atypiques et solitaires.
L’autre paramètre scruté lors de ce confinement a été le poids et la nutrition des joueuses. Comme l’explique Benjamin Barthélémy, « on est passé d’un entraînement quotidien assez intense à 3 ou 4 séances par semaines moins intenses donc il fallait aussi modifier cet aspect nutritionnel en conséquence et un peu réduire l’apport calorique ». Au Havre comme à Montpellier, la consigne donnée aux joueuses était simplement « de faire attention à ce qu’elles mangeaient pour arriver à la reprise en ayant limité une prise de poids trop importante ».
@FredLG
« [Lors de la reprise],le risque de blessure va être très élevé car le sportif de haut niveau n’est pas habitué et préparé à avoir une aussi longue attente entre deux saisons » – Olivier Bernal
Le mot d’ordre de la reprise : progressivité
Quand on évoque la reprise des entraînements, les deux spécialistes sont unanimes : « il va falloir être très progressif, encore plus que d’habitude ».
Olivier Bernal met en garde contre « le risque de blessure » qui va être selon lui « très élevé car le sportif de haut niveau n’est pas habitué et préparé à avoir une aussi longue attente entre deux saisons ». Exemple à l’appui, il prône la vigilance maximale. « On a pu le voir notamment chez les pros qui ont repris. Umtiti et Ibrahimović se sont fait les mollets et puis on a aussi eu Griedge Mbock qui s’est fait une rupture du talon d’achille » L’idée est donc « de vraiment prendre le temps de passer palier par palier, de travailler en sécurité, de faire attention aux joueuses et de renforcer musculairement avant d’aller taper dans les hautes intensités »
Sur ce point, ce n’est pas son homologue havrais qui va le contredire. « Sur les dix premiers jours il va vraiment y avoir un travail d’aérobie, un travail de course et on va très peu toucher le ballon. Il va falloir faire très attention à la continuité, à la progressivité de toutes les actions spécifiques au football. Habituellement on fait des préparations de 5-6 semaines mais la on fait une préparation de 8-9 semaines pour vraiment se donner le temps d’avoir cette progressivité » annonce le préparateur du Havre AC.
Le club normand a tout à gagner à se montrer prudent et à prévenir les blessures. Tout juste promu en D1, une saison intense attend le HAC et chacune des joueuses sera essentielle à la sélection pour faire face aux meilleur du football féminin.
Le MHSC a annoncé une reprise des entraînements dès le 29 juin et le Havre AC à partir du 2 juillet.