
Sakina Karchaoui pendant la préparation en Pologne ©Irek Pindral
Ce samedi à 21h, Sakina Karchaoui retrouvera ses anciennes coéquipières au domaine de Grammont, là où elle a tout connu. Actuellement en pleine bourre, la latérale de 24 ans pourrait faire mal aux joueuses de Frédéric Mendy. Itinéraire d’une joueuse entrée dans une nouvelle dimension.
Le transfert de Sakina Karchaoui de Montpellier à Lyon fut l’un des feuilletons de l’été. Avant de s’engager pour une saison avec l’Olympique Lyonnais le 24 juin, l’internationale française a été courtisée par plusieurs grandes écuries européennes. Chelsea, le Barça, le Bayern, le PSG, tous se sont jetés sur la joueuse reconnue pour son explosivité et son apport offensif hors norme. C’est tout sauf un hasard pour Jean-Louis Saez, qui l’a coachée pendant cinq saisons à Montpellier. « Saki s’est toujours mise des paliers et elle avait les aptitudes et l’inné pour les franchir. » Son amie et ex-partenaire sous le maillot pailladin Marion Torrent, n’est guère étonnée par la trajectoire prise par Karchaoui. « Elle est en train de concrétiser tout ce qu’elle a appris depuis ses débuts. Aller à Lyon et jouer titulaire, c’est une suite logique dans sa carrière ».
Du travail et du talent
Des U19 du MHSC en 2009, à la découverte de la D1 en 2012, à celle de l’équipe de France A en 2015 et de la Ligue des Champions en 2017, Karchaoui a bien changé. L’actuel directeur sportif du MHSC l’a vue évoluer chaque année, avant qu’elle ne choisisse de partir de son club de toujours, en temps voulu : « J’aurais aimé la voir rester deux ou trois ans de plus (rires), mais elle a su prendre le temps de grandir.
Elle est partie quand elle était prête, contrairement à d’autres. Elle est arrivée à maturité, elle sait quand il faut monter ou pas, elle sait gérer la profondeur défensivement, elle est très complète. » Au fil des exercices, Karchaoui s’est montrée toujours plus indispensable. Elle a enchaîné cinq saisons de suite comme titulaire indiscutable. « Elle a progressé de façon régulière. À ses débuts à 16 ans, elle perdait tous les ballons. Mais peu de footballeuses ont ses appuis, son dynamisme, son peps. Elle a fait énormément de progrès, elle arrive à être plus juste dans son jeu. Sa plus grande marge de progression, c’était d’être capable de faire tout vite avec justesse, et elle est en train d’y arriver. Aujourd’hui, elle arrive à contourner les blocs, à dédoubler, à rentrer dans la surface. Elle peut aussi prendre ses responsabilités sur coups de pied arrêtés, enrouler, centrer tendu… » développe Jean-Louis Saez.

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Avant le début de la crise sanitaire en mars, Karchaoui était sur des chapeaux de roues. Même raccourcie, sa saison de D1 2019-2020 comme milieu gauche au MHSC a été d’une excellente facture. En sélection, le replacement plus haut sur le terrain d’Amel Majri lui a permis de prendre du poids chez les Bleues, au poste de latérale. C’est le travail et ce talent si singulier qui lui ont permis de s’attirer les convoitises des plus grands clubs et de signer en juin avec le sextuple champion d’Europe. Quant à la septième couronne européenne acquise par l’OL à San Sebastian, Karchaoui y a grandement participé.
Un Final 8 de haute volée et une adaptation express avec l’OL
Depuis son entrée à la 64e minute du quart de finale de la UWCL contre le Bayern, elle a su se rendre irremplaçable. Si Jean-Luc Vasseur avait décidé de faire d’Amel Majri la latérale de l’OL pour l’entame de ce Final 8 contre les Bavaroises, il ne s’est pas trompé par la suite. L’ex-Montpelliéraine a été alignée d’entrée contre le PSG et Wolfsburg lors du dernier carré. Et elle a su briller par son activité incessante, ses projections vers l’avant et ses centres souvent dangereux. « Quand elle a peu de déchets, comme sur les matchs de Ligue des Champions, elle est inarrêtable » affirme Jean-Louis Saez.

Sakina Karchaoui pendant la préparation en Pologne ©Irek Pindral
Karchaoui n’a pas eu besoin d’une longue adaptation. Une préparation estivale à Tignes, puis en Pologne et elle était prête à s’installer avec une facilité déconcertante dans le meilleur club européen. En septembre, lors de sa conférence de presse de rentrée, Corinne Diacre – présente en tribune lors du Final 8 -, a avoué avoir été « bluffée » par ses performances en Espagne. « J’espère qu’elle rééditera ces performances avec l’équipe de France, c’est tout ce que je peux lui souhaiter » rapportait la sélectionneure.
Depuis, la native de Salon-de-Provence semble avoir pris une nouvelle dimension. En Bleue comme à Lyon, elle a enchaîné les titularisations. Quatre sur quatre avec le maillot tricolore, six sur six en D1 Arkema cette saison. L’immense domination lyonnaise dans le championnat de France lui permet de déborder comme elle en a le secret. « Elle essaye d’apporter plus offensivement, d’être plus décisive. Elle est plus lucide et plus adroite sur sa dernière passe, notamment lorsqu’elle parvient à dribbler plusieurs joueuses », constate Marion Torrent, avant d’enchaîner, « Physiquement, elle a évolué aussi. Elle se dépensait beaucoup et parfois, les retours défensifs étaient plus difficiles, mais elle a gommé tout ça. »

©Manu Cahu
Un nouveau statut chez les Bleues
Depuis la Coupe du monde 2019, elle a pris cette place à gauche de la défense, et elle n’est pas prête de la lâcher. Son duo flamboyant sur le côté gauche des Bleues avec Amel Majri a fait des étincelles lors du tournoi de France en mars, juste avant le confinement. Et même si l’actualité récente nous a rappelé qu’aucune joueuse n’a de place garantie sous Corinne Diacre, Karchaoui paraît désormais indispensable en sélection.
Alors qu’elle vient de quitter Clairefontaine pour retrouver le Groupama Training Center de l’OL, elle a encore été l’une des principales satisfactions de cette trêve internationale, avec une performance remarquée contre l’Autriche, toujours grâce à cet apport offensif permanent. Elle n’a pas non plus eu de problème pour tenir son couloir face à Stefanie Enzinger. Ce samedi, la latérale retrouvera le club qui l’a faite grandir et plusieurs de ses ex-partenaires. Même si l’effectif a beaucoup changé cet été à Montpellier. « Ça va faire un peu bizarre de la voir avec un autre maillot car lorsqu’on la voit, c’est à la télévision ou en sélection, où elle est dans notre équipe. On sait qu’elle est dans une nouvelle équipe mais le terrain reste le terrain, en dehors, ça sera autre chose », promet Marion Torrent qui sera cependant suspendue pour cette affiche de gala contre l’OL. Karchaoui, elle, sera bien là, prête à rayonner lors de retrouvailles attendues mais forcément redoutées par la défense pailladine.